Le deuxième souffle

Ce soir à Leeuwin

En approche imminente de la longitude du cap Leeuwin, nouveau grand marqueur de son Vendée Globe après Bonne Espérance, Thomas Ruyant, à l’instar d’un coureur de fond, reprend en cette sixième semaine de course, son second souffle. La semaine écoulée, émaillée de nombreuses et sérieuses turpitudes techniques, a fait basculer le skipper du « Souffle du Nord pour Le Projet Imagine » dans cette autre dimension propre à ce tour du monde de tous les extrêmes, celle de l’aventure, de l’imagination, de l’improvisation et du dépassement de soi. Manchonnage et remplacement de lattes de grand voile, aveuglement puis colmatage d’une importante voie d’eau, escalade dans le mât, rien, en quelques jours seulement, n’aura été épargné au Dunkerquois lancé au coeur des immensités ventées de l’Indien. Et Thomas de relever un à un chaque nouveau challenge jeté sur sa route. Il reprend aujourd’hui posément ses esprits, ré apprivoisant en douceur sa monture rétablie pour poursuivre avec un regard neuf et de nouveaux objectifs son grand voyage.

 

Ce soir à Leeuwin

« C’est un Cap important ! Reste plus que le Horn (Rires). » Thomas Ruyant, la caisse à outils enfin refermée, se fait en son 37ème jour de course plus contemplatif des merveilles qui l’entourent. « Aujourd’hui, j’ai eu droit à une  super lumière sous des nuages anthracites, dans  30 nœuds de vent, avec un beau soleil et c’est un moment sympa, sur une mer ordonnée avec de belles crêtes blanches. Deux ris-J2 ; ça glisse tout seul. » Quelque peu sonné par l’urgence des interventions à réaliser dans l’adversité, il retrouve aujourd’hui recul et lucidité pour se remobiliser autour de nouveaux objectifs, et de nouvelles méthodes de vie. « La semaine  se termine enfin, et j’ai retrouvé la pêche » résume t’il. « Les lazy bags sont en place et je remets du charbon. Les soucis techniques m’ont un peu entamé. Ils m’ont demandé beaucoup d’énergie. Il faut à présent tout remettre en route comme pour un nouveau départ, revoir ma façon d’être avec mon bateau, remobiliser l’envie et la méthode…mais ça y est! Le bateau est relancé à 100%, le bonhomme est au top, ma situation est limpide. » Et de murmurer, presque gêné : « Cette voie d’eau ! Quelle vision d’horreur ! Je suis fier de moi. Après chaque réparation, quel bonheur ! »

Un nouveau départ, « en chasse patate »

Thomas s’attaque au long parcours sous le continent australien en parfait solitaire. Ses compagnons de route de la première moitié de course se sont échappés tandis qu’ils multipliaient les interventions techniques de haut vol. Son premier poursuivant, Louis Burton, est à 900 milles. «  Je repars et je me remobilise avec un bateau à 100%, mais sans adversaire à portée. Ce n’est pas évident. Je dois remettre du charbon. Le groupe Le Cam-Dick est loin. Mes poursuivants sont loin. Je suis un peu esseulé mais je vais cravacher pour rester au contact. Je fais ma propre course. Je suis content de mon  classement. (8ème ndlr). Il va encore se passer des choses. Je prends les choses avec philosophie. Je préférerai être en groupe, mais c’est ainsi. »

Un sentiment incroyable…

« Un gros coup de vent se prépare pour le groupe devant moi sous la Tasmanie. Je ne sais pas comment ils vont gérer. Pour moi, cela se présente mieux en arrière du front. Je vais avoir du vent fort ces prochaines heures mais maniable et de manière pas trop compliquée. Le tunnel entre la Nouvelle-Zélande et la zone d’exclusion des glaces est bien bouché pour le groupe Eliès-Dick-Le Cam. J’essaie de glisser dans ce goulet entre zone des glaces et Australie. On a des infos météo fiables et je ne vois rien d’inquiétant pour moi ces prochains jours. La mer n’est pas bien rangée mais rien de dantesque. Je n’ai pas encore utilisé mon troisième ris. Je ressens un fond de fatigue. Le bateau parait un peu plus dur. Je vis bien à bord. Le temps s’écoule assez paisiblement finalement. Je commence à ouvrir des livres et à devenir plus contemplatif sur le pont. Je réalise que je n’ai jamais été aussi loin de chez moi. Je suis à l’autre bout de la planète et je profite de cet incroyable sentiment… »

Photo P.Bouras
 

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